- Une lettre reçu au petit matin où il y a écrit:
- Cher M. Montgommery.
Par la présente lettre, je vous offre mon aide. Par le serment d’Hippocrate, j'ai juré de soigner chaque malade, sans distinction. Je ne peux donc aucunement rester sourd à votre appel.
Je me rends dans les plus brefs délais à l'hôpital.
Cordialement,
Dr Gimsh O. M.
En décachetant l’enveloppe, Montgommery soupira de soulagement. L’interne se doutait bien que le Dr Gimsh n’agissait pas par altruisme mais bien par obligation. Et sa réputation lui était connu : un hûme carriériste et très égoïste. Ce qui ne collait pas vraiment avec l’ambiance plutôt « On-fait-avec-ce-qu-on-a » fataliste mais résolument positive du centre de soin.
Cyrielle avait tenté de rassurer un peu :
« Ce nouveau médecin ne peut pas être aussi dur que tu le dis, Montgommery (c’était une habitude que tous avait prise, de l’appeler par son nom plutôt que par sa future distinction)
, et puis il verra sans doute les choses d’un autre angle, après s’être un peu habitué à nous et à la ville. Nous avons de la chance ! »Le positivisme désarmant de l’infirmière lui avait arraché un sourire, et Montgommery se prit à espérer qu’elle ait vraiment raison, et que le Dr Gimsh ne se transforme pas en un dragon suceur de sang imbectable sitôt les premiers obstacles rencontrés.
En attendant, l’interne avait prévenu le Dr Alan qui avait reçu la nouvelle un brin froidement. Le médecin n’avait pas vraiment apprécié l’initiative de son interne, mais en même temps, comment lui en vouloir ?
Montgommery n’avait pas prévu de rencontrer Gimsh si vite, pensant que ce dernier aurait besoin de s’installer d’abord, ou de… Enfin… de freiner sa venue le mieux qu’il pouvait. Mais avec l’avis municipal cela réduisait son champ d’action et surtout faisait connaître sa présence à tous. On pouvait déjà sentir un afflux massif de patient (surtout de pauvres gens sans ressources) qui s’étaient précipités vers l’hôpital sitôt la nouvelle publiée dans les journaux. L’interne n’aurait pas une seconde à lui.
« Excusez-moi, êtes vous Montgommery ? Oristor Melchia Gimsh. Je suis venu dès que j'ai pu. »Montgommery sursauta. On venait justement de prévenir l’interne qu’un hûme réclamait son attention pour déposer « un paquet. », ceci ajouté à ce que la police venait de lui apporter…
Bon sang ! L’interne n’était pas habitué à gérer cette situation, c’était Amaël (le Docteur Solype) qui s’en occupait normalement ! Jouer les intermédiaires avec ceux qui se faisaient appelé les « Balayeurs » mettait Montgommery particulièrement mal à l’aise. Parce qu’il ne fallait pas être arcano pour deviner que ce qu’on lui amenait dans des paquets… avait été
vivant à un moment donné. Et surtout… que ce n’était
pas exactement hûme.
Gimsh ne pouvait pas tomber plus mal, mais il faudrait faire avec. Et l’habituer au plus vite, aux procédures étranges de la maison.
« Dr Gimsh ! , l’interne se saisit de la main de son interlocuteur pour la serrer chaleureusement quoi qu’un peu rapidement (elle était bizarrement froide).
Je n’espérais pas votre venue si vite ! Vous m’en voyez… , les mots s’étranglèrent dans sa gorge, l’interne se renfrogna soudainement. Montgommery venait de croiser le regard d’un balayeur barbu qui avait osé mener son paquet jusqu’à cet étage.
Dr Gimsh ! – L’interne n’avait pas laissé le temps au respectable médecin de souffler (même si ce dernier n’en était plus anatomiquement capable),
si vous voulez bien me suivre… Je n’avais pas prévu de vous infliger ceci dès votre arrivée mais… Je n’ai pas vraiment le choix. »Et Montgommery marcha d’un pas décisif vers la morgue où le balayeur l’avait précédé d’un haussement d’épaules. Gimsh n’avait d’autres choix que de les suivre.
Une fois descendu dans les quartiers froids et obscurs de la morgue, Gimsh assista à une scène des plus étranges. L’hûme barbu remit quelques documents à l’interne, en déposant lourdement son « paquet » sur l’un des brancards mortuaires. Montgommery s’en saisit un peu en tremblant, assurant que le Docteur Alan s’en occuperait au plus vite. Que l’hûme recevrait le pli habituel au Downward bar, comme il était de coutume.
Et lorsque ce dernier interrogea du regard la présence de Gimsh, Montgommery annonça très vite qu’il s’agissait d’un médecin réputé et compétent qui les aiderait momentanément. Le balayeur fort peu bavard, reparti sans un mot.
L’interne eut à peine le temps d’expliquer au nouvel « équipier » de quoi il en retournait. L’habitude de ses mercenaires à ramener… disons les cadavres de choses… dont l’interne ne connaissait pas la provenance. En général, le Dr Alan se basait sur les observations du médecin présent pour en faire un rapport et euh… L’envoyer au Downward Bar. C’était la « procédure ».
Et qu’elle s’ajoutait aujourd’hui à un autre cadavre plus « officiel » celui d’un ou d’une hûme (encore que l’interne n’en était pas sûr), dont on lui avait ramenait les restes… en bouillie.
C’est ce moment que choisit Cyrielle pour débarquer tout essoufflée :
« Montgommery ! C’est Mme Grey ! »Mme Grey était une patiente paranoïaque et hystérique dont seules les capacités de Montgommery réussissaient à calmer les crises. Lors de ces dernières, Mme Grey, tranquille vieille dame de 70 ans, devenait méconnaissable et monstrueuse, s’attaquant à tout le personnel et toute personne qui croisait son chemin.
L’interne s’excusa platement à Gimsh. L’interne reviendrait probablement tout de suite après avoir calmé cette dame (et lui avoir administré un calmant). Enfin, c’est ce que pensait ce dernier. Sans se douter qu’on ne lui laisserait pas le temps.
Montgommery avait demandé au Docteur s’il pouvait jeter un œil aux deux derniers arrivants (les deux cadavres) et de faire ses observations. Mais l’interne avait oublié que c’était justement aujourd’hui qu’un dénommé Jon Pace avait convenu de lui rendre visite à propos de ces « crimes ». Le Dr Alan l’avait mis en garde contre tout fouineur, mais après tout, le Dr Gimsh devrait se débrouiller, non ? Un imminent praticien comme lui ?