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 Feu je suis - Laeranh Fraï

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Feu je suis - Laeranh Fraï Vide
MessageSujet: Feu je suis - Laeranh Fraï   Feu je suis - Laeranh Fraï I_icon_minitime23.01.11 3:44

I. Identité:




Nom :Fraï
Prénom :Laeranh
Surnom :Flamme (nom de scène), la Peste, P’tite Chose, P’tit Monstre (le plus commun)…
Sexe :femelle féminine ^^^
Age :12 ans, je vais sur ma treizième année !

Race :Färdilian.
Spoiler:

Idéologie :Glaciarun a créé les Färdilies à l’opposé de son image, peut-être un Dieu bienveillant existe-t-il ici ?...
Métier :Cracheuse de feu, et accessoirement, bobonne du cirque Sian… donc en quelque sorte torche-derrières, nettoyeuse, dresseuse, micro-mascotte, cobaye, jongleuse de temps à autres (bolasses enflammées par exemple)…


II. Conscience du monde et Magie:

Connaissance des extra-tyrestres :En fait, je ne sais pas vraiment… Papa disait toujours que nous venions d’un autre monde, mais y’a tellement de gens qui disent que je viens de la forêt d’Adhenor… Et puis franchement, pour ce que ça m’avance de savoir ce genre de choses… Moi je veux pas rentrer chez moi, de sur, et tant que les gens me laissent tranquille, alors ça me va, qu’ils soient ou non de ce monde. Je sais qu’il y a d’autres êtres comme moi qui ne sont pas issus de ce monde, papa m'en a souvent parlé ; mais quant à savoir lesquels…

Conscience :initiée, moi je sais que je suis capable de faire d’la magie en y pensant très fort… mais y’a des gens qui n’y croient pas, et comme il ne faut pas décevoir les croyances des autres, je les laisse penser ce qu’ils veulent.
Technique :Glaciarun a façonné Grailli avec sa magie, et nous sommes nés dans ce monde ; je suppose donc que je suis issue de la magie même, elle fait partie de moi comme je fais partie d’elle… alors on peut dire que je suis Rough.
Spécialisation :
Papa disait toujours « nous sommes le feu incarné » et moi, je le crois.

Au cours d’une vie, j’ai lu dans le livre de papa que chaque membre de mon peuple apprend à connaître et à maîtriser la magie du feu qui le compose. Enfin, je ne sais pas trop si c’est lui qui fait partie de nous ou nous qui faisons partie de lui… mais c’est pas le plus important !
Je ne suis pas assez grande et forte pour manipuler cet élément qui me constitue, mais je sais dores et déjà le souffler, car mes poumons changent l’air que je respire non en dioxyde de carbone, mais en hydrogène (c’est en partie la raison pour laquelle ma voix est si aigue, d’ailleurs) et je suis parvenue à me concentrer suffisamment pour l’enflammer.
En effet, il me faut certes quelques secondes pour vider ma tête de toute pensée, sans quoi je suis incapable de pratiquer mon art ; je pense bien fort au feu tandis que j’inspire, comme me l’a appris papa, et lorsque je souffle enfin, à la sortie de ma gorge, l’hydrogène s’enflamme ! Suivant l’inspiration que j’ai pu prendre, la durée du souffle de feu sera plus ou moins longue.
Le problème, c’est que si je le fais trop souvent et trop longtemps dans une courte période, des migraines affreuses, parfois suivies de quelques nausées, s’emparent de moi… avant, quand ça m’arrivait, papa disait que c’était normal parce qu’on vit dans le froid, que si on vivant en Grailli ça serait plus facile pour moi d’apprendre, mais qu’avec un peu d’entraînement, je parviendrais à exercer ma magie sans avoir mal…

De plus, mon corps étant celui d’un monde de feu, il résiste à tout ce qui appartient au domaine de la chaleur. Donc il est impossible que je meure brûlée ; cependant, si je viens à me heurter au froid sans protection, je risque de subir exactement les même sévices que les Humes s’ils se frottent au feu.



III. Descriptions:


Description physique :

Ce que l’on distingue de prime abord chez moi n’est pas une forme, n’est pas un bruit, n’est pas la douceur de ma peau ni la couleur de mes yeux, ni même la fraîche gaieté qui semble si souvent s’emparer de moi. C’est la chaleur naturelle que je dégage. Enfant du feu, je suis entourée d’un halo de chaleur sèche, qui me protège un tant soit peu de ce froid qui me cerne de toute part, dans ce pays que je hais. Puis vient la forme. Une silhouette élancée mais petite, un rouge écarlate en guise de couleur de peau, des cheveux forme de flamme comme mon surnom, et blancs comme la neige dans laquelle je vis, cette neige meurtrière qui m’enlève chaque jour un peu de ma vie, de ma si précieuse et bouillonnante vie… de feu je suis, il est ma seule raison d’être, et j’ai les airs d’un monstre des flammes comme on en parle si souvent dans les contes pour que les enfants qui n’ont pas été sages aient peur de la nuit venue.
Pourtant, si l’on oublie cette couleur apparemment monstrueuse, je pourrais ressembler à tout bout de chou banal de ce monde, Tyr. Surplombée par des traits fins blancs en guise de sourcils, une couleur verte emplie mes grands yeux pleins d’innocence, un parfum doux et fruité s’évapore de ma peau, celui du désert et du sable chaud soufflé par les vents tempétueux et brûlants de Grailli. Une voix sonnant comme un coup de cuillère contre du cristal, aigue, très aigue… trop aigue ! On dit même qu’elle casse les oreilles, alors que concrètement, une oreille ne se casse pas… un tympan, je veux bien, ça se perce, mais… là n’est pas la question ; disons simplement que ma voix n’est pas la plus appréciée, sauf lorsqu’elle est utilisée pour de quelconques chants, bien que ma timidité s’emparant de moi lorsque je suis prise au dépourvu ne rende cette voix chevrotante… je possède également un tout petit nez qui dépasse à peine de mes deux joues de poupon dont la forme ronde n’a jamais voulu quitter mon visage ; et dessous, surplombant un petit menton arrondi, des lèvres généreuses et plus sombres encore que le teint de ma peau. Un corps souple et agile, un port altier, un popotin qui risque de devenir généreux et aimé par la gent masculine avec l’âge, des seins qui prendront de la forme et de la taille en même temps que lui, de petites oreilles qui ne demandent rien de plus qu’entendre des gentils mots au lieu de ces ordres et ces menaces qu’elles subissent depuis si longtemps ! Au bout des fins doigts de fée que je possède se trouvent des griffes aussi noires que les ailes des corbeaux, aussi terribles que le sont les ongles de toute femme qui se respecte malgré mon âge peu avancé. Longues et pointues, comme celles des félins, mes dents ne laissent personne m’insulter sans laisser un souvenir amer d’une éventuelle altercation avec moi.
Papa disait toujours que je ressemblais beaucoup à ma vraie maman. Celle qui m’avait donné le jour et ne me verrait jamais grandir ; il disait aussi que mes yeux auraient du être plus jaunes, et mon corps plus fin encore, parce que 30 kilos pour 1 mètre de haut, il disait que c’était un peu trop, et que je devais faire de l’exercice… parce que les femmes, sur Grailli, elles sont beaucoup plus fines que ça ! Mais d’un autre côté, moi j’ai pas à chasser les bêtes de notre monde, donc j’ai pas à être comme les femmes de notre monde.
A l’époque où j’étais dans les rues, le seul habit qu’il m’était donné pour les spectacles était une robe aussi blanche que mes cheveux et qui me descendait jusqu’au milieu des cuisses, avec des bottes blanches et des gants blancs… rien de bien extravagant somme toute, j’étais en rouge et blanc… A présent que j’appartiens au cirque de Sïan, mes habits tendent vers le jaune et le noir : je porte une robe jaune fendue jusqu’aux hanches, par-dessus un short noir et des chaussettes hautes noires dans des ballerines jaunes ; je possède des gants en cuir jaune, ainsi qu’un masque aux bords dentelés, jaune aussi. Par ce masque, mes yeux sont blancs, d’un blanc aussi laiteux que… enfin, on le sait déjà !
Enfin, lorsque je suis laissée seule avec moi-même, perdue dans ce monde de brutes, ce que je porte ressemble à un sarouel noir, chemise noire aussi, le tout sous une longue cape grisonnante à capuche sous laquelle je cache ma personne. La cape de feu mon père adoptif…



Description morale :




Ecartelée. C’est ce que je suis depuis la mort de la seule et unique famille que j’avais avant ; c’est ce qui cause une certaine bipolarité de ma part, parfois je suis gentille et douce, d’autre fois, je suis arrogante et méchante. Ces deux dernières caractéristiques de ma personne ne sont révélées que les jours où je me suis levée du pied gauche, qui sont généralement aussi marqués par certaines formes de maladresse disons plus terrifiante (la maladresse semble être un mode de vie chez moi, il ne se passe pas un jour sans que je trébuche ou fasse tomber quelque chose) qu’à l’accoutumée. Quand il se fait un jour où quelque chose va mal, vous pourrez être certains que tout ira mal ! En effet, ce sont les fameux jours où l’on ferait mieux de rester couché !
Papa disait toujours que si je devais échanger ma naïveté contre le pouvoir de Glaciarun, il ne suffirait pas d’un seul Glaciarun ; j’ai jamais vraiment compris ça, mais il m’a expliqué que ça veut dire que je suis trop crédule. Et c’est pas faux ; quand je rencontre quelqu’un, la suspicion est mise de côté, je ne mens pas aux gens sauf quand papa me disait de le faire, je ne vois pas pourquoi on me mentirait… alors j’ai une légère tendance à croire tout ce qu’on peut me dire. De plus, j’aime bien que le monde autour de moi sourie… alors j’ai toujours besoin de jouer les joyeuses, les douces, les câlines, les ceci, les cela… comme ça, même si ça va pas dans ma tête, le sourire des autres s’empare de moi et j’oublie ce qui ne va pas.
Mon plus grand défaut, c’est sans doute la curiosité ; je sais, normalement, on appelle ça une qualité, mais la mienne tend vers la perversion ! Il n’est pas rare que je me fasse prendre à espionner les gens à travers les fenêtres qui donnent chez eux, à fouiller dans les placards ou à lire les choses les plus délicates si ma main vient par malheur à se poser dessus. Quand je ne peux pas obtenir de plus amples informations en posant des questions, je n’ai aucun scrupule à remuer ciel et terre pour avoir une réponse par mes propres moyens, quitte à me faire réprimander à grands coups de pieds dans le derrière. C’est différent du vol, je ne fais que me renseigner, je laisse toujours ce que j’ai trouvé là où je l’ai trouvé, même si ça me plait. C’est papa qui m’a dit que c’était pas bien de voler. Il a dit aussi que c’était pas bien de fouiller dans les choses de la vie privée des gens, mais ça, j’arrive pas à ne pas le faire.
De temps à autres, il suffit d’un petit quelque chose pour que je me mette à crier tout d’un coup, sans raison apparente… c’est normal ! Papa disait que les membres de ma race sont des sanguins, et que de temps à autres, l’énervement s’empare de nous. Parce que les gens ont dit quelque chose qui nous blessait au plus profond, sans le vouloir peut-être… un mot, une phrase que j’ai pu entendre et qui a gravé dans mon petit cerveau un message d’alerte. Je suis aussi capable d’héberger en moi ce sentiment mauvais, fille de la colère et de l’envie, la jalousie ! Sans vraiment savoir comment ni pourquoi, il m’arrive de me sentir gênée, mal, énervée à cause d’une babiole. Pourquoi j’ai pas ça moi ? Et pourquoi j’peux pas faire ça moi ? Et pis pourquoi j’suis traitée comme un monstre moi ? Alors que ch’uis peut-être plus gentille que l’espèce de garce là bas ! Et moi aussi je voudrais bien avoir une maman comme ces enfants ! Et puis moi aussi je voudrais bien ne pas avoir à faire la miséreuse pour vivre !
Mais finalement, mon côté doux et bon me rattrape facilement. T’as besoin de manger quelque chose ? T’as froid ? T’es fatigué ? Viens me voir et tu pourras manger dans mon assiette, partager ma cape, dormir dans mon lit… Mais le premier qui me touche, gare à lui ! J’ai des dents et griffes, et je n’hésite pas à en faire bon usage ! De plus, ma naturelle gentillesse fait de moi une confidente à part entière, qui ne propose pas de conseils malvenus si la personne qui se confie à moi n’en a pas demandé ; de plus, je ne suis pas une balance. Quand bien même vous auriez tué, si vous me dévoiliez ce secret et me disiez de me taire, je me changerais en tombe. Vous pouvez avoir confiance en moi.

IV. Précisions supplémentaires:

Style de combat :A vrai dire, je suis contre toute forme de violence, mais s’il le faut alors je me bats ; la légèreté ainsi que la souplesse et la vitesse que je tire de mes ancêtres femelles me donnent la force de m’extirper de combats éventuels ; si je sais que je n’ai aucune chance, je privilégierai la fuite (naïve mais pas folle !), et si je sais que je suis capable de prendre le dessus, je ne ferai que ce qui est nécessaire pour m’en sortir vivante. Je suis incapable de tuer ; jouant des ombres et de mon talent du feu, tout en essayant de ne blesser personne, je peux mettre en déroute celui qui me fait face.
Talents particuliers :capable de me fondre dans le noir comme une ombre parmi les ombres, j’apprends aussi très rapidement, plus rapidement sur autrui d’ailleurs que sur les choses réellement importantes comme les coutumes et les choses à savoir sur le reste de la population de Tyr… je suis aussi capable de m’éparpiller et de faire semblant d’écouter avec une aisance terrifiante. Enfin, je me mets dans des situations désastreuses avec une facilité désarmante !
Signes particuliers :Attachante ? C’est assez difficile à cause de son physique démoniaque. Tellement mignonne ? Là aussi, inutile de se forcer à se décrisper devant un être aux allures monstrueuses, même si c’est un enfant totalement naïf. Charismatique ? Non ; pas vraiment, non… Bah en fait, à part ma couleur de peau et de cheveux, et mon pouvoir, je n’ai aucun signe particulier.


Dernière édition par Laeranh Fraï le 16.11.11 21:48, édité 3 fois
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Feu je suis - Laeranh Fraï Vide
MessageSujet: Re: Feu je suis - Laeranh Fraï   Feu je suis - Laeranh Fraï I_icon_minitime23.01.11 3:44

V. Histoire:



L’eau. Je déteste l’eau. Emmitouflée dans le manteau de feu mon pauvre père, assise près de cette flaque immonde, j’imagine à travers ce liquide meurtrier dans lequel je me noie sans en avoir même jusqu’aux chevilles, les premiers instants.

Dans la chaleur suffocante de l’endroit pour l’instant protégé, dix âmes, rassemblées pour un événement qui, dans une situation normale, aurait été heureux, dix qui seront bientôt au nombre de onze. Pour un laps de temps particulièrement court, ces membres d’une même famille sont réunis, ici et maintenant. Mais ce n’est pas une situation normale. Ils sont ensemble, c’est le plus important.
Elle se force à ne pas hurler, cette femme apparaissant dans l’eau si froide. Les autres n’ont aucun visage, puisqu’ils sont le fruit d'une innocente imagination, et puisqu’ils sont moins importants qu’eux deux. Ensemble, ils forment une famille inconnue. Ma mère. Qu’elle est belle ! A travers la surface aqueuse qui me nargue de par cette douleur qu’elle me procure, j’observe comme je l'invente, la scène qui est sur le point de se transformer. Plus que quelques instants.
Les autres sortent ; restée seule avec sa sœur, dans une petite pièce séparée de l’autre par un vétuste pan duveteux, la femme à la peau blanche et aux cheveux de sang cède à la douleur et son doux râle se transforme en hurlement, qui sera le premier, mais aussi le dernier. On pourrait croire qu’un autre hurlement, plus aigu, plus plaintif, celui de l’être qui se heurte pour la toute première fois à cette chose affreuse qu’on appelle la vie, aurait suivi celui-là ; mais la nouvelle petite créature qui vient agrandir la famille qu’elle ne connaîtra jamais ne fait qu’observer la femme qui la tient à bout de bras, de ses yeux arrondis par la curiosité qui l’habite déjà, comme si elle savait que crier à son tour ne ferait que précipiter ce qui arrivera de toute façon.
La tante du rejeton va couper le cordon ombilical avant d’envelopper l’être chétif dans une couverture, avec un calme saint et une précision chirurgicale ; mais va-elle donner à la mère, qui se remet tant bien que mal de sa douleur endurée en silence et avec tant de courage, qu’un lourd bruit se fait entendre. En tant que ses partisans, ils se trouvent sur l’ancien territoire de Lelliv, le Roi déchu, et comme lui, ils doivent payer le prix fort de leur immonde volonté royaliste.

Je soupire. A peine venais-je de naître que déjà, j’étais soumise à la mort. Que déjà, la fin de ma vie se profilait, comme celle de ma famille entière. Mon existence aurait été bien courte si je n’avais été cachée de leurs regards avides de sang et de chair flagellée. Ou peut-être un membre du peuple m’aurait recueillie, peut-être aurais-je grandi parmi les miens, dans mon milieu, et non dans un monde froid et méchant… à nouveau, je soupire. A quoi bon ressasser les souvenirs si ce n’est pour garder que les mauvais ?

Devant moi, la tante du marmot le pose près du puis dont la lave frémit, tout au fond. Elle remonte le seau tandis que derrière elle, le bruit se rapproche, installe le bébé à l’intérieur, puis laisse lentement la corde glisser entre ses doigts jusqu’à ce que le seau soit au fond. Rassurée de voir que le bébé a tout juste la tête sortie de la lave, elle attache la corde à un pilier proche du puis, juste à temps pour s’approcher de sa sœur qui hurle en voyant arriver les cinq soldats venus pour s’emparer d’elles. Ni l’une ni l’autre ne résiste, de toute façon ; c’est inutile. Alors ils s’éloignent avec elles en quelques secondes, tandis que le sixième observe la chambre dans les moindres détails. Il regarde au fond du puis, ne voit que quelque chose qui ressemble à une bordure du seau et ne prend pas la peine de le remonter pour savoir ce qui s’y trouve.

Est-ce une bonne chose ? Une mauvaise ? Je ne le saurai jamais.

Étrangement, une fois que le calme s’est installé dans la demeure quasiment vidé de toute vie, il dure, il dure… on dirait qu’il est devenu maître des lieux, qu’il va détruire la totalité des entités ici, que tout ce qui se trouve dans la maison succombera bientôt au silence immonde qui s’est fait une place plus grosse que celle qui lui était due, comme si tout allait s’émietter par sa simple présence. Il dure donc, jusqu’à ce qu’un gémissement se fasse enfin entendre, suivi d’un cri aigu, puis d’un hurlement perçant en guise de premier contact auditif avec le monde, seulement entrecoupé par l’aspiration d’air de celui qui s’égosille avec tant de ferveur.
Dehors, tandis que les autres chargent les membres de la famille, un Färdili lève la tête. Un soldat. Mais qu’en sait cette si petit chose qui vient de naître ? L’homme à la peau orangée descend de sa monture enflammée et s’éloigne en silence de ses camarades pour trouver la provenance de ces cris à s’en déchirer les cordes vocales. Les autres n’entendent pas, les bruits sont trop étouffés par ce qui les entoure et trop loin pour que les Färdilies ne les entendent. Du régiment, c’est lui qu’on appelle Longue-Oreille. C’est certes un sobriquet quelque peu ridicule, même s’il lui va merveille. Bref, lui seul a donc entendu l’appel plaintif de la pauvre petite créature sans défense. Il fait le chemin, arrive dans la demeure. Il écoute attentivement. Le silence ayant repris son trône, le Färdili doit chercher dans les moindres recoins de chaque pièce du petit logis ; point par point, il cherche où peut bien se trouver le poupon qui, il y a de cela quelques instants, provoquait autant de remue-ménage dans son ouïe affutée… jusqu’au puis de lave. Son oreille attentive parvient à déceler, parmi les bulles de gaz qui explosent paresseusement à la surface du liquide bouillant, une petite, toute petite respiration saccadée. Il se penche, ne voit que ce qui semble être un seau sortir du magma en fusion. Mais il fait confiance en son sens. Et il sait ce qu’il a entendu. Alors il défait le nœud qui relie l’enfant à la vie, et tire sur la corde jusqu’à ce que le seau n’apparaisse avec, à son bord, s’amusant à frapper le magma comme il le pouvait, le nourrisson livré à lui-même.
Longue-Oreille, Furriji de son prénom, n’at jamais dérogé à la règle, il suit son maître et souverain en bon aveugle guidé par le borgne. Il suit l’exemple. Mieux encore : il le donne. Il ne va pas faire d’entorse, surtout pour une fille de valets d’un ancien monarque tombé de son trône. Mais alors qu’il soulève le corps du bébé, prêt à le remettre à ses frères d’arme pour qu’ils lui fassent subir le même sort qu’au reste de sa famille, leurs regards se croisent. L’enfant n’a pas peur. Il écarquille sur lui des yeux mêlant curiosité et admiration.
L’homme ne tient pas plus de dix secondes. Il préfère risquer sa vie pour un être dont le futur est déjà compromis plutôt que de défendre une créature au cœur de pierre pour oser ordonner à ses larbins d’ôter la vie à un être aussi adorable que celui-là. Tenant la chose silencieuse entre ses mains, son regard s’adoucit et il se jure de veiller sur la vie du frêle être de feu, au péril de la sienne. Après tout, cette petite a toute la vie devant elle !

___



Une goutte vient perturber l’eau, par de multiples ondulations perpétrées par son choc contre la surface de la flaque. La vision se brouille devant moi. L’eau se réchauffe doucement, comme pour me consoler. D’autres ondulations viennent imiter les premières, puis une vague traîtresse m’offre un nouveau chapitre de ma vie…

Deux personnages. Habillés de pied en cap. Pas question de laisser un seul morceau de peau à l’air libre dans un froid si mordant ! la lumière les inonde tandis qu’ils marchent dans la neige, main dans la main, comme un père et sa fille. Fille du peuple ou fille de la haute ? En ce temps, la gamine est certaine, malgré tout ce qu’évite de lui dire son protecteur, d’être la fille unique du Souverain renversé. Quel âge a-t-elle ? Trois ans ? Quatre peut-être ? Quelle différence de toute façon, si ce n’est qu’à quatre ans, on sait faire ses lacets ?! Mais s’il ne s’agissait que de cela… Ce n’est pas la seule chose qu’elle s’imagine.
En effet, la gamine dont la stupidité peut être expliquée par sa naïve et imaginative jeunesse, croit aussi dur comme fer qu’elle est issue d’un conte de fée, que cet homme, celui qui la laisse l’appeler Papa, est le Prince Charmant qui aurait du venir la libérer d’un sortilège jeté sur elle, mais qu’un élan d’amour pour elle l’aurait fait enfreindre les lois du conte, qu’il se serait retrouvé dans le corps de son père, incapable alors d’épouser celle qu’il aimait (et qui l’aimait), se voyant obligé de surcroît d’accorder sa bénédiction au premier branquignole venu qui lui demanderait la main de sa chère gamine adorée.

Torturée d’esprit, hein ? Remarquez, à cet âge, on a tous une drôle d’imagination. Enfin, je crois…

Il est préférable de faire une petite parenthèse concernant la véritable raison qui faisait leur présence en ce monde appelé Tyr. Étrangement, les deux êtres ne sont pas partis de leur monde chaud pour retrouver le doux confort d’un autre monde chaud. Je crois bien que ce pays précisément, de ce monde précisément, c’est celui que pourraient haïr tous les membres de leur race. Le grand avait expliqué au petit personnage de feu que la magie les avait amenés ici par une brèche pratiquée sur ce monde. Peu de planètes sont accessibles par des brèches. Et peu d’entre elles sont si froides que celle-ci. A vrai dire, Papa et Laeranh n’ont pas vraiment eu l’occasion de voyager. Et ce qu'ils font là, c’estse cacher. Il ne faut surtout pas que les soldats les trouvent pour les rapporter à leur dirigeant, donc ils restent dans ce froid, dans ce brouillard éternel, sachant qu’ils n’oseraient jamais s’aventurer par ici.

Mais un jour… non, je plaisante. Ils étaient à la fois trop frileux et trop bêtes pour ne serait-ce que penser à nous chercher dans une contrée froide… et puis quoi ! Faire déplacer toute une garde pour deux petits individus alors qu’on a un monde à diriger et des partis à démembrer ? Même le plus abruti des empereurs (sans référence aucune) n’aurait pas eu une idée aussi sotte… quoi que quand j’y pense, un tyran comme Melga Effran aurait pu l’avoir.

Bref, l'homme et l'enfant n’ont jamais eu de souci avec d’éventuels chasseurs à leur poursuite.
L’homme qui s’occupe de l'enfant l’avait appelée Laeranh, et lui laisse le plaisir de l’appeler tout simplement « papa » puisqu'elle a poussé le délire de conte de fée jusqu’à se dire que la petite princesse qu'elle est n’est pas au courant du changement de peau de son Prince Charmant qu’elle ne pourra jamais épouser. Alors quoi ? Elle joue le jeu, c’est tout. D’ailleurs, elle remarque avec stupeur (ainsi qu’une pointe d’énervement non dissimulée) que lui aussi joue bien – trop bien même – son rôle de prince déguisé en père. De père tout court ! Ca agace toujours la petite Färdilian de le voir la regarder sans sourciller, plus comme un garde du corps que comme un amant.

Alors un jour… oui, je sais, c’est stupide, et à chaque fois que j’y pense, je me traite de stupide… mais je l’ai fais !
J’ai éclaté ! la colère dans la voix, je lui avais dis qu’il faisait un bien piètre prince pour la grande princesse que j’étais et qu’au lieu de ne rien faire, il ferait mieux de chercher une potion pour le délivrer de son sortilège afin de m’épouser enfin, que j’en avais assez de jouer les pauvres fuyardes dans un autre monde, que je voulais rentrer chez nous pour qu’ensemble, on renverse le tyran stupide qui régnait et enfin, prendre la place comme elle me revenait de droit plutôt qu’à lui !
Sa réponse m’avait flanqué un coup au cœur et au moral, mais j’avoue qu’avec le temps, j’ai plutôt tendance à en rire qu’à en pleurer comme je l’ai fait à cette époque. Je ris jaune, et comme dirait l’autre, ça me ferait même marrer noir (comme cette immonde flaque) mais au moins, cela fait à présent partie de mes bons souvenirs. Sur un ton qui ne se voulait que neutre mais qui cachait colère et lassitude, il m’avait annoncé le plus sérieusement possible que je n’étais qu’une pauvrette, et que comme il n’avait pas pu me vendre à de riches personnes ou me tuer lorsque j’étais bébé, il était parti avec moi dans l’espoir que quelque chose se chargerait de moi pour lui sur cette terre. Je lui en avais voulu pendant des mois entiers.


Dernière édition par Laeranh Fraï le 24.01.11 10:50, édité 5 fois
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Feu je suis - Laeranh Fraï Vide
MessageSujet: Re: Feu je suis - Laeranh Fraï   Feu je suis - Laeranh Fraï I_icon_minitime23.01.11 3:45



Je souris en regardant l’image brouillée de mon ex-mentor, quasiment placide face à moi hurlant que j’en avais marre qu’il ne prenne pas ses responsabilités de prince… je me prends même à pousser un petit gloussement, plongée dans la solitude de cette eau qui me tient compagnie dans ce froid matinal. Elle était gelée cette nuit, et ce matin, quelques morceaux de glace flottent un peu.

Plus tard, vers ses six ans, lorsqu'elle a enfin pardonné à son père ce qu’il lui avait appris, la gamine décide d'elle-même d’en savoir plus sur sa petite famille et ce qu'elle était en réalité. Pour ne pas déroger à la règle qui dicte aux petits Färdilies d'être naïfs et gentils, la petite Laeranh crois vraiment tout et n’importe quoi ! Mais bref. Il lui dit qu'ils étaient établis à la lisière d’une forêt de feu, et que, vivant de travaux fermiers, ils vivaient heureux. C’était bien loin de la vie de monarque, mais l'enfant avalait la moindre de ses paroles sans broncher ; après tout, il avait raison, c’était son père. Puis un jour, un Färdili était venu et avait dit à papa qu’il voulait faire de ses trois frères, trois sœurs et elle-même des soldats pour combattre le pouvoir en place ; papa avait refusé, alors l’homme et ses soldats avaient massacré toute leur famille, il n’avait réussi à s’échapper qu’avec le dernier de ses enfants, c'est-à-dire Laeranh. et il était arrivé sur Tyr.

A présent, je comprends qu’il m’avait raconté la vie qu’il aurait aimé avoir, et non celle que j’avais eue. Mais à ce moment, ma nature candide et naïve absorba comme une éponge cet énorme mensonge et s’y accrocha de toutes ses forces.

Avant cet âge, papa était le seul à travailler, mais à présent que Lae avait six ans, elle peut, comme lui, tenter de gagner leur vie, aussi dure soit-elle. Et elle l'est ! Traités de monstres, ils sont battus par les gens qui ne voveulent pas d'eux sur leur chemin, les enfants leur jètent des pierres en riant… et elle qui voulait jouer avec eux ! D’après les gens, ils sont des esprits ou des démons tout droit sortis de la forêt d’Adhenor, qu’ils portent malheur... mais quand elle veut leur annoncer qu'ils sont d’un autre monde, papa lui dit de les laisser parler. De toute façon, ça ne les rendra pas plus gentils envers eux.
Alors le travail de papa, ce n’est pas vraiment un travail qu’on qualifierait d’honorable, mais y’a pas de sous-métier, comme il dit souvent. D’ailleurs, ce n’est pas un seul travail, mais deux, qu’il fait. La gamine n’a pas assez d’expérience pour faire le même travail officiel, donc elle l’aide dans son travail officieux. De façon quasiment logique et banale, papa travaille dans les petits restaurants, comme rôtisseur ; il garde les fours chauds, il grille à point certains plats trop délicats à cuire sans une main experte, et il finit les petits détails qui font gagner un temps considérable aux cuisiniers puisqu’ils n’ont pas à faire chauffer ou préchauffer les fours pour une toute petite dizaine de secondes à rendre le dessus d’un dessert légèrement caramélisé par exemple. Un travailleur de l’ombre. Personne ne lui dit bonjour, personne ne le remercie, personne ne lui adresse gentiment la parole.
Et en guise de second job, papa est une sorte de chasseur de primes. Ici, je crois qu’on les appelle les balayeurs. La moindre demande de service, il y répond… enfin, ils y répondent, même si parfois, ça ne plait pas du tout à Laeranh.

Des fois, quand on rentrait chez nous, dans notre toute petite maison retapée à la va-vite et légèrement éloignée de la ville, il s’effondrait sur son vieux fauteuil et se prenait la tête entre les mains avant de murmurer qu’il en avait marre de cette vie de ramasse-merde. Je ne sais pas trop ce qu’est une merde, mais je crois bien que c’est péjoratif… en tout cas, quand je lui demandais ce qu’était une merde, il me répondait que c’était quelque chose qui ne devait pas sortir de la bouche d’une petite fille, qu’elle soit Färdilian ou Tyrienne. Je me suis toujours dis que les ramasses-merdes, ce sont les balayeurs, mais je me suis bien gardé de le prononcer à voix haute. Parce que je le respectais. Et sans doute aussi parce que dans le fond, Longue-Oreille est resté dans mon cœur comme le Prince Charmant de mon conte de fée.

___



Sachant ce qui arrivera d’ici peu de temps, je retiens ma respiration. Pour ne pas pleurer. Pour profiter du souvenir que j’ai gardé de lui. Mon protecteur. Mon Prince Charmant. Mon père. Furriji. Les ondes se floutent à nouveau, avant de montrer une autre image.

La petite Färdilian apprend à maîtriser ce qui l'inonde, le feu. La lumière brûlante, celle qui vit en elle, celle qui l’a faite, celle dont elle est issue avant d’être le fruit de l’amour entre deux êtres. Elle est avant tout le fruit de l’amour de Glaciarun pour son opposé. Les deux Färdilies prennent leur temps libre pour que le petit, qui est enfin en âge de maîtriser ce qui le compose, commence à façonner de la matière le plus simplement possible tout d’abord, il la souffle. La frêle créature apprend vite, aidée par son mentor, un expert bien qu’il ne sache pas lui-même maîtriser certaines techniques de manipulation pyrotechnique, mais soit… personne n’est parfait, n’est-ce pas ?
Leur vie, bien que mouvementée et torturée par ces gens qui ne les aiment pas à cause de leur pouvoir et de leur physique, est relativement belle. Car comme le dit si souvent papa, « émerveilles-toi de tout ce que tu vois et tout ce que tu fais ; celui qui fait ce qu’il peut aime la vie comme elle lui vient, tandis que le capricieux trouve toujours quelque chose à redire et finalement ne profite de rien » et même si l'enfant ne comprend pas tout ce que ça veut dire, s’il le dit, elle est d’accord avec lui. La vie… elle est belle, avec lui, dans leur logis, installé loin des autres, tranquille…

jusqu’à une journée plus froide que les autres encore, une journée si glaciale qu’elle gela mon cœur à jamais.


Ce jour là, ils sortent de la ville. Il neige, au dehors, et la petite Färdilian se colle tout contre son éternel protecteur; elle a dans les neuf-dix ans. Furriji arrive à dégager assez de chaleur de son corps pour qu’aucun des deux êtres de feu ne meure de froid, et ils ont, par-dessus leurs vêtements de chaleur, des manteaux pour les tenir à l’abri du froid. La petite maison les attend, plus loin, sur le haut de la petite butte. Une cabane en pierre contenant une table, deux chaises, un lit, une bassine et une cheminée. Dans la cheminée se trouve un feu qui, nuit et jour, brûle ; et une plaque se trouve incrustée à la table, sur laquelle se trouvent posées des braises ardentes. Le feu de cette demeure prend les trois quarts de l’espace. Leur gîte.
De par la chaleur qu’il dégage, le grand être fait fondre la neige sur leur route. Les enfants ne posent plus de question à ce sujet : on leur a dit que c’est la neige qui, d’elle-même, s’écarte sur leur passage, puisqu’elle les déteste plus encore que les gens. La petite créature a du mal à marcher, cette nuit a été très éprouvante pour elle, ils ont du beaucoup travailler et elle est exténuée. Alors, tenant faiblement la main de son père, elle traîne la patte, elle se laisse quasiment porter par ses bottes.
Soudain, le Färdili s’arrête ; la petite n’y prend pas garde et continue avant de se rendre compte qu’il est à présent derrière elle. Elle stoppe à son tour sa marche lassée, avant de tourner doucement la tête vers lui. Il se penche vers elle, elle voit bien qu’il voudrait aller vite, qu’il voudrait accélérer les mouvements et ralentir le temps, mais pour ne pas la brusquer, il tente de se contenir et de garder un calme presque serein. Il porte les mains aux épaules de sa cadette avant de la regarder dans les yeux. Elle ne peux pas bouger les siens.



_ Ecoute-moi très attentivement, dit-il. Ne pose aucune question, ne m’interromps pas.

Elle fait oui de la tête, soudain éveillée à la moindre de ses paroles. Il inspire profondément, fronce un instant les sourcils, ferme et ouvre les yeux.

_ Tu n’es pas ma fille. Je n’ai jamais été ni ton père ni ton Prince ; ta famille était l’une des plus nobles de notre monde, une famille proche de celle du Roi Lelliv. Quand Melga Effran le renversa et arriva au pouvoir, l’ordre fut donné à tous les soldats de tuer jusqu’au dernier membre de chacune des familles qui soutenaient Lelliv, après avoir brisé les cornes des nobles et coupé les queues de la famille royale. Ta famille portait le nom de Fraï et tous la connaissaient parce qu’aux côtés du roi et de son prédécesseur, ton père et ton grand-père avaient mené à bien des dizaines d’expéditions. Si tu as une corne sur le sommet du crâne alors que je n’en ai pas, ce n’est pas, comme tu le pensais, parce que je suis un mâle et toi une femelle, mais parce que je fais partie du peuple, et toi de la noblesse. J’ai rejoins les rangs de l’armée de Melga Effran parce que ma famille avait besoin de vivre, et j’ai participé à l’assaut contre Lelliv et les siens ; j’ai fais partie de ceux qui ont fait disparaître ta famille.

La petite a promis de se taire. Donc, malgré la fureur qui la fait bouillir, aucun mot, aucun son ne sort de sa bouche. Il a tué ses parents, il a participé au massacre de sa famille sans vergogne, lui qui médisait si souvent du tyran vaniteux alors qu’il ne vaut finalement pas mieux que ce dernier.
Tandis qu'elle le regarde, les poings serrés, la mâchoire tremblante de haine, le cerveau confus et écartelé à l’idée qu'elle n’était pas pauvre, que cet homme n’est pas son père, qu’il est encore moins le protecteur, l’ange gardien qu'elle a toujours imaginé, tandis que de son côté, le silence scelle sa bouche avec force, Furriji la regardait avec insistance. Comme s’il voulait qu'elle brise son serment, qu'elle bouge, qu'elle parle, qu'elle hurle…
Puis il reprend :

_ Je m’appelle Furriji, j’ai servi pour Melga Effran sans volonté, enrôlé de force parce que mon père ne voulait pas voir sa famille périr sous ses yeux. J’ai exécuté ses moindres désirs jusqu’au jour où je t’ai rencontré. Avant ça, j’avais si peur de mourir que j’en avais oublié le courage d’aimer. Je t’ai élevée, peut-être dans le but de me racheter, de me faire pardonner tout ce que j’ai pu faire de mal, mais surtout parce que j’avais besoin de me souvenir de ce sentiment que j’éprouvais, enfant. L’amour.

A vrai dire, son discours venait pour moi d’une autre planète car la colère que j’éprouvais à cet instant m’avait rendue aussi sourde et muette qu’un caillou.
« Le temps d’apprendre à vivre, il est déjà trop tard que pleurent dans la nuit nos cœurs à l’unisson »
Il est fort dommage que ce poète n’existe pas dans ce monde, et s’il avait écrites ces paroles, je mettrais ma main à la neige que c’aurait été à cause de Furriji et moi.


_ N’oublies pas ton nom, Laeranh. N’oublies pas qui tu es. Tu es une Fraï. N’oublies pas que ta famille était réputée. Et surtout, n’en aies pas honte. Prend ceci.

Je sors l’objet de ma poche. Mes mains se posent en douceur sur le cuir souple. Le grain du papier à l’intérieur est fin et raffiné. je peux fermer les yeux, il me suffit de passer le doigt sur les pages pur savoir où l’encre s’est incrustée. L’odeur de bois séché qui émane du papier me procure une sensation de bien-être, de confort. J’ai su lui pardonner, depuis peu, ce qu’il a fait. Il m’a sauvé la vie, ce n’est pas négligeable. Non une fois, mais deux.
Sous mes yeux, noyés dans l’eau glaciale que je n’ose toucher alors que je rêverais de caresser ces deux petits personnages si semblables à Furriji et moi, les deux êtres sont face à face. Et le petit prend l’objet que lui tend le grand malgré sa haine visible. Son journal. Une description très détaillée de leur race et de toutes les créatures qui peuplaient leur monde, puisque finalement, elle connaissait peu de choses de sa véritable patrie. J’étais sur Tyr comme réfugiée politique, et ce livre m’apprendrait bien des choses sur nous, nos technique de manipulation du feu, l’amour en Glaciarun… mes racines. Mon seul souvenir de lui. Avec ce qu’il vient d’annoncer à la gamine, elle a du temps pour apprendre, comprendre et accepter qui elle est.


_ Je suis désolé, dit-il encore, chère enfant. Tu devras rentrer seule chez nous.
_ Quoi ? Pourquoi ?
Il pose un doigt sur la bouche de la gamine surprise, tandis que ses petites mains à elle se recroquevillent sur le journal.
_ Vas-y. c’est le seul abri sur pour toi. Je te rejoindrai plus tard. C’est promis.
Sachant qu’elle est trop jeune et ne pourra donc sans doute pas survivre seule dans un milieu pareil même en un chemin si court entre lui et son foyer, Furriji ôte son manteau qu’il a réchauffé pour Laeranh, le pose sur les épaules de la petite, lève chacune de ses bottes avant de laisser l’enfant les enfiler par-dessus les siennes ; la tâche n’est pas difficile à accomplir, puisque les pieds de l’homme sont bien plus grands que ceux de la fillette.

Je me souviens encore de la force qu’il a mise dans sa bousculade pour me donner l’impulsion de partir, de courir en direction de notre gite. La neige et le poids que je portais m’empêchait d’aller aussi vite que je le voulais…

La petite fille s’élance comme elle peut à travers le peu de longueurs qui la sépare du doux foyer, elle sait qu’il ne faut pas se retourner. Alors elle ne se retourne pas. Elle court. Elle ouvre la grande porte en fer et s’engouffre dans la douce chaleur qui reste prisonnière des murs. Elle prend des braises dans ses petites mains, gelées alors qu’elle n’a pas fait plus de vingt mètres, pour se réchauffer, avant de s’approcher de la grande fenêtre solitaire donnant sur le reste de la plaine. Elle le voit, là bas, dans le froid, seul et sans veste pour le protéger de cette chose horrible qui mord à pleines dents dans votre peau timide et fragile. Il attend. L’eau qu’est devenue la neige en fondant autour de lui semble le sceller au sol qui le porte. Il semble savoir ce qui est sur le point de se passer.
Puis d’autres silhouettes le rejoignent. Ce ne sont pas des soldats de Melga Effran.
Un groupe de cinq humes s’approche de lui. Trois sont armés. La petite, observatrice de la scène derrière le verre insipide est incapable d’ouvrir la fenêtre, mais elle ne comprend rien à ce qu’ils disent.
Cependant, elle n’est pas bête pour autant, et lit le stress que les hommes montrent de par les grands gestes vifs qu’ils font. Ils semblent énervés…
Puis l’un d’entre eux ouvre le feu. Des tas de coups de feu, avec des touches de couleur de partout.

Je me souviens de ce petit feu d’artifice coloré rouge, blanc et jaune, dont les fusées meurtrières ne traçaient pas de route dans le ciel mais dans la chair. Dès que j’ai entendu le bruit horrible, je me suis accroupie sous la fenêtre, les mains lâchant les braises qui se prirent à rouler paresseusement sur le sol et se plaquant tout contre mes oreilles, mes pauvres petites oreilles. Je savais que ça ne servirait à rien, que je les entendrais de toute façon…

Au bout de quelques secondes, le silence a retrouvé sa place au milieu du carnage. Accroupie, les mains sur les oreilles, les yeux fermés, les dents serrées, elle attend. Lorsqu’elle se rend compte que le bruit a disparu, elle ouvre les yeux. Regarde de gauche à droite. Lève lentement les mains de ses oreilles. Mais sans décrisper la mâchoire, elle se relève doucement, jusqu’à avoir les yeux au niveau de la fenêtre, comme si elle avait peur de savoir ce qu’elle va trouver là dehors. Et elle a raison d’avoir peur. Elle voit à ce moment la scène qui lui donnera froid jusqu’au fond de son cœur ! Et sans doute aussi jusqu’à sa mort.
Furriji, son kidnappeur, son ange gardien, son Prince, son père, son meilleur ami, le seul être de sa race dans ce monde, est étendu dans la neige, qui l’enveloppe en partie, tel un lit, neige rouge comme ces fleurs qu'elle aime tant. Debout face à lui, seuls deux des cinq hommes. Les autres sont dans le même état que papa. La neige ne fond plus autour de lui…

Lentement, un douloureux grincement d’agonie crisse le long de ma gorge, tandis que les larmes bouillantes, dégageant une douce fumée blanche, coulent le long de mes joues.

Celui des deux qui a une arme, le plus petit encore debout, passe d’un corps à l’autre tandis que l’autre reste stoïque. Rien de tout cela ne semble l’avoir choqué. S’il reste trop longtemps là bas, dans le froid, il va mourir !
Mais sous mes yeux pour la seconde fois, alors que la petite chose va prendre des braises pour les enfouir dans ses poches afin d’aller aider son mentor, elle le voit se relever. Doucement. Fébrilement. Il semble si faible… l’armé pointe d’abord son canon vers lui, mais l’autre pose sa main sur l’objet, et ainsi, ils le laissent s’avancer avec tant de douleur vers la maison. Je suis là, je t’attends… c’est ce que pense la petite fille aux cheveux blancs. Il pose un pied devant l’autre, et pas à pas, il parvient à la porte. L’enfant n'attend pas un signe de sa part et s’y précipite pour lui ouvrir, elle garde les yeux grand ouverts sur ce qu’elle voit alors. Sa bouche s’ouvre en un « oh » muet de surprise et d’horreur.

_ Papa ? Demande-t-elle. Tu… tu saignes…
_ Je t’avais promis que je rentrerais, moi aussi, répond l’homme en caressant les cheveux de la gamine.

Des gouttes tombent sur le sol. D’un rouge pourpre. D’abord petites et rares. Ensuite, c’est un véritable torrent. L’homme ne tient plus debout. Mais il ne veut rien montrer à la petite de sa peur. Peur de la mort. Alors il se met à genou comme il le peut, pose une main par terre et lentement, comme si l’on avait arrêté le grand sablier de Glaciarun pour que le temps lui-même le voit s’écrouler là, sous ses yeux. Et il s’allonge. Sur le dos. Le regard tendu vers le toit de leut gîte. On aurait dit que le rouge l’inondait. La petite Färdilian se penche vers lui. Elle le secoue. Elle donne toutes ses forces à le faire bouger. Mais il ne dit rien, il ne réagit même pas… elle s’énerve.

_ Allez, arrête de faire le malin maintenant ! C’est pas drôle d’abord ! C’est pas drôle du tout. Et puis tous tes trucs comme « t’es une pauvre, t’es une riche, j’ai tué tes vrais parents » ça non plus, c’est pas drôle !C’est même nul, très nul !

La porte grande ouverte laisse entrer deux ombres que l’enfant ne voit pas, dont elle se fiche totalement.

_ Allez, réveilles-toi ! C’est nul de faire ça. Ça suffit. Viens te réchauffer sinon tu vas avoir du mal à travailler…
_ C’est plus la peine, petite. Il est mort.

Mort ? Non, c’est impossible. Elle commence à avoir froid et la braise s’éteint à petit feu dans les poches de la veste de la petite. Il ne peut pas être mort ! Il ne doit pas être mort, il doit s’expliquer. Pourquoi lui a-t-il menti pendant toutes ces années ? Et puis, elle n’a jamais vu la mort, elle croit que son protecteur dort. L’homme calme a de nouveau posé la main sur l’épaule de son confrère plus petit. Ce dernier semble colérique. Laeranh répète encore deux ou trois fois à l’homme de se réveiller, mais elle doit bien se rendre à l’évidence qu’il n’est pas en mesure de le faire, puisqu’il ne respire même plus.
Presque aussi froide que la neige, presque aussi neutre que la porte grande ouverte derrière elle, presque aussi immobile qu’une statue, elle le regarde. Accroupie près de son visage. Lui aussi la regarde, sans la voir. Il la traverse. Il traverse le toit, il regarde le ciel, il regarde ailleurs. Tout en la regardant, elle. Les pieds de la petite fille sont son seul point d’attache avec le sol. Elle a ramené ses genoux vers son thorax et les a entourés de ses petits bras. Elle pose la tête entre ses genoux. Puis elle tend une main. Elle pousse du doigt celui qui l’a élevée. Comme sa propre fille. Le corps réagit avec mollesse.

J’ignore combien de secondes, de minutes, passèrent à partir de ce moment là sans que je ne bouge, sans qu’un bruit vienne perturber le silence.
La mort et le silence.


Puis elle se met à hurler ! Hurler à s’en déchirer elle-même les tympans ! Et elle frappe le corps de l’homme, elle le roue de coups, elle ne fait pas attention à la douleur qu’elle ressent aux mains. Et au cœur. Imbécile, t’es qu’un imbécile, qu’elle crie. Tu m’abandonnes, t’es un lâche.
Puis, aussi vite qu’elle était arrivée, la colère disparaît de son regard, la petite fille s’arrête, laissant juste son souffle rauque transpercer le silence douloureux.
Le plus calme des deux hommes pose la main sur son épaule et la force à se lever.

_ Viens avec nous, dit-il. Nous allons nous occuper de toi.
_ Mais vous êtes pas comme moi. Vous vous occuperez de moi moins bien que lui.
_ Alors tu nous expliqueras. C’est lui qui nous a dit de le faire. Il l’a dit avant de mourir.

Elle n’en sait rien. Furriji est mort sans une parole. Les deux hommes veulent se servir d'elle et de sa manipulation du feu pour se faire de l’argent, mais qu’est-ce qu'elle en sait ? Rien. Elle n'en sait rien.
Le regard de l’enfant passe de Furriji à la main de l’hume. L’autre commence à grogner, mais le grand le bouscule gentiment ; tandis qu'elle retourne à l'observation de son prédécesseur immobile, il ajoute à son compagnon :

_ Laissons-lui faire le deuil. Quand il fera trop froid pour elle, elle nous acceptera.

L’enfant n’écoute pas, n’entend pas. peu lui importe… les deux hommes sortent, laissant négligemment la porte ouverte.
Il faut beaucoup de temps à la petite pour qu’elle se rende compte qu’en réalité, ils ne sont pas sortis seuls dans le froid. Elle les a suivi mentalement, car à l’intérieur de la demeure, plus rien ne brûle. Le froid a du éteindre le feu et les braises sur la table… ou bien ce sont eux. La petite chose ne sais pas allumer un feu aussi bien que le savait jadis feu son père. Et elle aurait bien aimé le veiller… alors elle regarde une dernière fois Furriji.

_ Si tu m’as confiée à ces humes, je ne pense pas avoir le choix.

Il ne répond pas. Elle aimerais pourtant qu’il lui dise quelque chose. Pas de « Vas-y », pas de « Non ! Restes ! » ni de « je t’aime » ou de « BOUH ! J’rigolais, tu m’as cru hein ! ».
Non ! Rien. Rien de rien. Elle hausse les épaules. Elle s’en fiche dans le fond. Il l’a abandonnée après avoir tué ses vrais parents. Pour elle, c’est tout.
Elle se lève, et avant de sortir, voit le journal. Elle ne peut pas s’empêcher de le prendre. Il lui a donné, de toue façon. Puis, après un dernier long regard sur lui malgré tout le mal qu’elle lui veut encore pour lui avoir dit des choses aussi méchantes, elle rejoint le froid et referme la porte.

Je frappe l’eau violemment, qui me répond en m’éclaboussant le visage de ses bras aqueux et sournois, une baffe qui répond à une autre. Sombre créature que l’eau ! Je hais l’eau ! Comment des êtres sensés peuvent-ils te boire, monstrueuse créature glaciale, méchante et sans cœur ? comment peut-on te considérer même comme source de vie ?!
Tu es la source de ma mort, de ma peine ; des fois, je viens à me demander où est passé papa, où est passé celui qui m’a élevé comme on élèverait son enfant chéri. J’en pleure la nuit, j’en deviens irritable. Et comme il n’y a pas de coupable sur qui me défouler, c’est toi que je hais. Bien sur qu’il me manque ! Il a eu beau participer au meurtre de mes parents, il n’a jamais cessé d’être pour moi comme une famille de substitution.


Dernière édition par Laeranh Fraï le 23.01.11 20:44, édité 3 fois
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Feu je suis - Laeranh Fraï Vide
MessageSujet: Re: Feu je suis - Laeranh Fraï   Feu je suis - Laeranh Fraï I_icon_minitime23.01.11 3:46



L’eau n’est pas aussi troublée que moi. Elle a d’autres choses à faire, peu lui importe la vie. Ma vie. Elle n’a aucun cœur, elle ne vit pas, ELLE ! Elle se fiche bien de tout ce qui l’entoure. Doucement, elle reprend sa forme d’origine. Les ondes deviennent de plus en plus faibles.
Je voudrais oublier tout ce que j’ai vécu, tout ce que je sais déjà. Mais mes yeux se posent à nouveau sur elle. Et je vois.


Les deux humes tentent comme ils peuvent de s’occuper de la gamine, mais à présent que ce sont eux qui en ont la charge, ce sont eux qui décide de ce qu’elle doit faire. Et son nouveau métier, c’est fausse-sauvage et cracheuse de feu dans les rues de la ville. Secaria. Le plus grand et calme des deux s’appelle Oro Zin. Il fait en sorte que les trois compères aient à manger le plus souvent possible, mais leurs petits plats sont souvent vides… quant au petit gros qui passe son temps libre à se plaindre et à râler sur le fait que la gamine est plus un fardeau qu’un cadeau pour eux, il s’appelle Diego. Diego Maleveine. Lui force l’enfant à utiliser sa manipulation de feu jusqu’à ce qu’elle soit complètement épuisée, jusqu’à ce qu’elle s’effondre de fatigue.
Laeranh apprend à jouer de la musique, à danser et à exécuter les moindres ordres du grand Oro. Elle apprend ce qu’ils appellent les ficelles du métier.
Au début des spectacles, elle apparaît menottée, attachée à une laisse et muselée, elle doit faire semblant d’être méchante et sauvage. Ça fait plus réaliste dit Oro. Parce que les gens croient que c’est un démon. C’est Diego qui s’avance en premier, et jongle avec ses quilles, ses assiettes, ses verres, ainsi que divers objets prêtés par les spectateurs, ce qui en soi, est une excellente méthode pour les faire rester jusqu’à la fin du jonglage, et peut-être donner une petite pièce… Puis Oro s’avance, il fait deux ou trois tours de passe-passe, il fait apparaître une colombe, il s’amuse de voir les divers bijoux des femmes dans ses poches à lui. Et il fait sortir l’enfant de l’ombre.
La muselière est enlevée, la fille-bête crie, hurle comme un animal méchant, jusqu’à ce qu’Oro prononce les vraies-fausses paroles magiques pour transformer ce monstre en enfant normal. Tandis qu’il dit des paroles totalement insignifiantes, la môme est en transe, elle se met à se tordre en tous sens, puis enfin, elle s’arrête. Elle regarde autour d’elle, et elle parle. Elle demande où elle se trouve. Un membre de la foule interloquée lui répond. Oro demande à un homme respectable qui s’est arrêté pour voir la curiosité vivante s’il peut lui prêter sa montre pour que la non-animale puisse lire l’heure. Et elle le peut. Tout le monde applaudit. Oro la fait danser des claquettes, sur une musique qu’il joue en compagnie de Diego ; il la fait jouer de la flûte traversière, de la harpe et du banjo ; il lui fait cracher le feu pour le plus grand plaisir des petits et des grands.
Mais au final, il n’y a que deux ou trois pièces dans la coupelle adressée à la population Secarienne. Et la gamine a toujours faim. Et mal. Mal au crâne…

___



Papa disait toujours « L’Hume est un loup pour l’Hume ». Et jamais sa phrase n'a pris autant de sens que cette fois...
Je ne me souviens plus du jour où les Humes qui s’occupaient de moi ont disparu, laissant à la place des animaux. Une panthère noire et un loup gris. Inutile de chercher à savoir qui était qui. Oro était le loup, c’était évident. Enfin… aux premières secondes pendant lesquelles j’ai vu l’animal, j’ai cru que c’était Oro. J’avais peur de Diego, il était méchant, il était fourbe. Il avait cette lueur dans les yeux, celle du fou. Diego était un cinglé, et c’était la raison pour laquelle je me tenais loin de lui le plus souvent possible. Oro, quant à lui, était gentil et doux avec moi. Très froid et distant, mais jamais il n’osa lever la main sur moi. Jamais il ne chercha à me faire du mal ou à faire quelque chose contre ma volonté.
Sous mes yeux, la flaque me montre cette période pendant laquelle je me suis retrouvée désespérément accrochée à une branche d’arbre, apeurée à l’idée que l’un d’eux ne me mange.


Au milieu d’un paysage de neige, une silhouette, immense. Un arbre. Un arbre, solitaire. Installée sur l’une des branches les plus hautes et les plus solides pour la porter, Laeranh enlace comme elle peut le tronc qu’elle ne veut pas quitter. Elle a eu si peur ! D’un coup, elle est devenue toute petite, insignifiante, ridicule, si petite qu’elle s’est même demandé si elle n’est pas devenu à nouveau un bébé. Mais pire encore, ses deux nouveaux pères de substitution ont laissé place à deux animaux, de terrifiants prédateurs. Elle a eu tellement peur de se faire dévorer qu’elle a couru dans le petit matin vers le premier arbre qu’elle a vu, qu’elle a grimpé comme elle a pu et qu’elle s’est tassée sur l’une des branches. Et elle a attendu. Lorsque le loup et la panthère sont arrivés à l’arbre, ils ont tous les deux aboyé et miaulé vers elle, sans doute pour qu’elle redescende, mais si c’était pour la manger ? Alors la panthère tente de grimper à l’arbre à son tour, pour la calmer, pour lui montrer qu’elle ne veut pas de mal à l’enfant. Qu’est-ce qu’elle en sait, la gamine ?!

_ Allez-vous en ! Qu’elle hurle désespérément.

Mais ses cris à elle aussi sont devenus autres qu’humenoïdes. C’est aussi un animal ? Non ! Impossible ! Un cauchemar, elle est dans un immense et monstrueux cauchemar ! La panthère arrive à elle. Et sans bouger ses lèvres félines, il lui parle... de la pensée ?

*Ne t'en fais pas*
*Diego, me manges pas, par pitié !*

On dirait des piaillements, des couinements de furet… la panthère regarde l’enfant changée avec un mélange de douceur et d’amusement. Mais la petite créature ne voit rien de drôle là dedans. Elle comprend alors que c’est Oro. Alors que la grande bête parvient à la branche où se loge la petite emplie de frayeur, cette dernière se colle contre ses pattes, apeurée.

* Qu’est-ce qu’il se passe ?*
* Tu es une belette, Laeranh. Tu es juste devenue une petite belette blanche. Calme-toi. *
* Descendez, bande de singes ! Hurle le vrai Diego, en bas. *
* Je veux pas me calmer… je veux pas descendre. Je veux pas être mangée !*
* Bien. *

Le félin plonge avec grâce au sol, rejoignant alors son compère canidé qui grogne encore, la laissant seule.

* Quand tu seras calmée, tu nous rejoindras. Nous sommes à la maison. *

Une punition. La gamine sait ce que c’est ! Comme à chaque fois qu’elle refuse de faire quelque chose, ils l’abandonnent là où elle s’est arrêtée. En disant que quand elle l’aura décidé, elle les rejoindra. C’est à la fois gentil et méchant, la bonté employée dans la phrase donne une bonne leçon à l’enfant. Elle lui dit à la fois « prends le temps de t’habituer à ce que je viens de dire » et « tu es incapable d’évoluer, mais je comprends ».
Oui, il y a un côté tranchant à ces paroles ; même les premières de ce genre qu’il a prononcées. Quand elle a été obligée de quitter Furriji. Ces paroles sont glacées, elles clouent la petite fouine sur place, incapable alors de bouger, car ne sachant si elle doit les écouter selon leur premier sens, ou avoir honte de ne pas avoir fait confiance en son protecteur et donc les suivre, ou si pour la même raison, elle ne doit pas plutôt rester prostrée là, pendant quelques temps encore.
C’est comme s’il lui proposait de s’infliger cette punition à elle-même. Elle ne sait jamais quoi faire ou dire lorsqu’il parle ainsi. Et en général, elle reste. Longtemps.
Une fois que la nuit est tombée, que les ombres ont repris leur pouvoir sur la lumière, et que la petite créature n’est plus visible, du moins le croit-elle, elle ose enfin descendre de l’arbre. Elle retourne à la petite cabane qui sert de maison aux trois compagnons.

Quelques jours passent ainsi, les trois compagnons apprennent à vivre comme des animaux… jusqu’au petit matin qui redonna froid à la peau de Laeranh. Oui, pendant un temps qu’elle ne saurait connaître, elle a enfin trouvé le moyen de ne plus avoir froid sans utiliser cette éternelle couverture. Une épaisse fourrure lui tenait chaud nuit et jour… mais ce matin là, elle se réveille sans poils blancs qui ondulent dans les ondes douces de l’air. Elle se regarde. Sa peau rouge est nue, sur le siège unique qui se tient dans la pièce. Elle a retrouvé ses mains, ses pieds. Que s’est-il passé ? Comment a-t-elle retrouvé sa forme naturelle ? Et ce froid qui s’empare d’elle… vite, elle se saisit d’une couverture, qu’elle prend, qu’elle roule autour de son petit corps qui va mourir… Comme celui de Furriji.
Le loup ouvre les yeux, lève la tête, grogne vers elle avant que la panthère ne se réveille à son tour et s’approche d’elle. Ça y’est, elle va se faire manger ! Diego se lève et avance, lui aussi, mais au lieu de la regarder avec curiosité et même une certaine pointe d’admiration, c’était avec colère et envie ! il montre les crocs, un grognement sourd monte dans sa gorge et il se jette avec fureur sur la gamine effrayée qui hurle, qui tente de s’échapper de la demeure tandis que le grand félin noir corbeau stoppe son cousin canidé dans sa course folle. Ils se battent, derrière elle… ils se battent comme des fous.

Je me revois courir à nouveau vers l’arbre. Je revois la petite Laeranh se jeter contre le tronc, cracher ses flammes comme elle le peut, et tandis que le végétal immense s’embrase dans la neige, elle grimpe.

Sa couverture, la cape de papa, seule seconde peau, l’entoure, résistant comme elle au feu qui mord l’écorce souffrante du grand être immobile. Et plus loin, les hurlements prédateurs et plaintifs des deux éternels rivaux, le loup et la panthère, qui s’entre-déchirent pour savoir si l’enfant va vivre ou mourir. Une fois de plus. Si elle avait eut une véritable famille, la gamine aurait compris qu’il ne s’agit que de la petite dispute de couple, entre papa et maman ; plus grosse qu’une dispute normale, bien sur ! De celles où papa frappe maman.
Et entre les flammes, elle ne décèle pas les silhouettes des hommes habillés de pied en cap qui viennent pour soigner ses compagnons. Les soigner de cette maladie qui a fait d’eux des bêtes. Lorsqu’ils sortent de la cabane, ils transportent un corps. Laeranh ne voit pas que l’être qu’elle déteste le plus au monde n’aura plus de raison de lui en vouloir de quelque chose qu’elle ne comprend pas. Elle ne voit pas non plus, quelques instants plus tard, un Oro tout neuf sortir à son tour de l’endroit pour venir la chercher. Mais elle l’entend qui l’appelle, parmi les crépitements confortables de son élément.

_ Laeranh. Descend, il n’y a plus rien à craindre.

Dans sa voix s’entendent la tristesse et le soulagement mêlés. Mais cette fois-ci, elle écoute, elle descend. Elle se laisse porter, par l’hume soucieux qu’elle ne se blesse les pieds nus dans le froid du brouillard, jusqu’à la cabane, ou elle s’habille à nouveau comme elle le faisait avant. C’est pourtant la seule et unique fois où elle n’aurait pas du faire confiance. Peut-être l’aurait-il gardée. Peut-être serait-il resté avec elle au lieu de mettre fin à ses jours, quelques temps après s’en être débarrassé.
Pendant quelques temps encore, il est gentil, et doux, et attentionné avec elle. Plus qu’à l’accoutumée. Mais l’enfant ne se méfie de rien, Diego disparu, elle est persuadée que tout ira mieux à présent.

Ou pas…

___



Le cirque. L’endroit où je me trouve aujourd'hui. Il y a quelques jours, je suis arrivée ici. Une semaine au plus. Je n’ai pas besoin de la flaque pour savoir ce qui m’est arrivé depuis que Diego est mort dans sa lutte contre Oro. Que me montrerait-elle de toute façon ? Pourquoi ne pas regarder, finalement…

C’est le soir. Depuis quelques temps, Oro se comporte bien mieux encore avec elle qu’auparavant, quand Diego était encore là. Il la tient par la main, comme Furriji le jour où il est mort. Il serre sa main, il la serre fort. Depuis le début de la journée, il n’a pas prononcé une seule parole. Pas une seule. Une fois de plus, le silence s’est installé dans la vie de la petite Laeranh, se faisant son meilleur ami. Son seul ami.
L’hume n’a pas voulu lui dire où il comptait l’emmener. Mais lorsqu’elle voit se profiler le chapiteau du cirque Sian, elle se rend compte avec douleur que deux seules issues sont possibles à cette éventuelle rencontre qu’ils vont faire. Elle est naïve, mais pas bête, la gamine. Et elle sait qu’Oro n’a déjà pas assez d’argent pour manger, alors pour voir un spectacle… ainsi, elle comprend aussitôt que le cirque, elle n’y va pas pour faire partie des spectateurs. Et sa main à elle se crispe sur celle d’Oro, qu’elle croyait être son protecteur. Elle ralentit le pas, elle voudrait reculer, elle tire vers l’arrière. Il n’ose pas la regarder, continue, inlassablement ; et aucun des deux ne parle, et aucun des deux ne veut céder du terrain à l’autre. Pourtant, l’hume est plus fort que la Färdilian. Alors elle tire sans raison, elle se laisse à moitié traîner, les larmes aux yeux, la gorge serrée. Mais elle ignore que de son côté, l’hume éprouve exactement les mêmes sentiments.
Sans céder aux miaulements presque inaudibles de la pauvre petite, il continue de marcher, et elle doit bien se rendre à l’évidence. Une fois de plus, elle a perdu un père. L’hume s’arrête face à un bonhomme de petite taille, aux longs cheveux grisonnants, un petit être mal rasé. Ils parlent de l’avenir de l’enfant. De l’avenir du cirque. Mais elle n’entend rien. Ne veut pas entendre. Pour une fois, elle parvient à se détacher de l’ambiance, regarde le sol encore fumant, ne pouvant se dépêtrer de cette brume incessante. Et froide. Elle joue avec les formes molles qui se dessinent sur la blancheur vaporeuse. Les hommes discutent calmement.
Puis le nain éclate d’un rire qui fait frémir l’enfant, avant de les laisser tous les deux. Oro s’agenouille. Il la regarde dans les yeux. Elle ne veut pas, elle détourne les siens.

_ Je sais que tu vas être en colère contre moi. Mais ici, tu es en sécurité. Ils s’occuperont de toi. Je n’en suis plus capable.

Elle grogne, comme si elle avait gardé la couche de poils qui faisait d’elle une belette.

_ Tu as le droit de m’en vouloir, je ne m’attends pas à ce que tu comprennes. Adieu.

Puis il lâche soudainement la main de Laeranh, qui se retrouve seule, sans rien. Sans but ! Sans père. Elle voudrait que l’impulsion lui soit donnée, l’impulsion pour qu’elle bondisse vers lui, qu’elle le rejoigne, la même impulsion que celle donnée par Papa le jour où il est mort… il est sa seule famille… sa seule famille.
Alors qu’elle va pour se donner elle-même l’impulsion qu’elle cherche, une main ferme et bourrue s’abat sur son épaule.
Elan brisé. Rêves perdus. Espoir mort.

Maintenant, c’est le Cirque, ma famille. Et Albert n’est pas prêt de me vendre, lui ! Tant que je lui rapporte de l’argent, je sais qu’il aura besoin de moi. et quand je n’aurai plus besoin du cirque, je m’en irai.

Et même si je ne compte pas retourner sur ma planète natale, je n'oublie pas qui je suis. Je suis Laeranh Fraï. L'enfant d'une des dernières familles nobles de mon monde.
Ca, personne ne pourra me l'enlever !


Dernière édition par Laeranh Fraï le 24.01.11 11:18, édité 3 fois
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~Et encore un schizo sur le forum.~

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Signalement : L'autre main du Destin (probablement la gauche) Compte PNJ réservé à la validation des fiches. NE PAS MP.


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MessageSujet: Re: Feu je suis - Laeranh Fraï   Feu je suis - Laeranh Fraï I_icon_minitime24.09.11 21:52

Fiche du pokémon validée par Kaïden (j'ai hélàs fait une mauvaise manip' et j'ai perdu la sauvegarde de votre échanges hors-jeu qui suivait, désolée ^^").


NB: Les fiches ont été nettoyées de tous les post non rp. Désormais, l'auteur du topic est le seul habilité à poster.

Ce topic vous servira à la fois d'étendard, comme de journal intime ou fourre-tout, tant que cela concerne Laeranh.
Spoiler:
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MessageSujet: Re: Feu je suis - Laeranh Fraï   Feu je suis - Laeranh Fraï I_icon_minitime

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